Different
trains :
Before the war (1988)
Steve REICH
(1936-)Steve REICH
Œuvre pour quatuor à cordes et bande magnétique.
Il est le plus talentueux
représentant de la musique répétitive, qu'il a inventée, et qui
connue beaucoup d'imitateurs. Sa musique est fondée en général sur le traitement
par répétition, emboîtement, superposition, décalage de
motifs plus ou moins brefs. Ces motifs de base possèdent toujours une pulsation
très affirmée et très régulière et un centre d'attraction tonal
également très défini. La musique de Steve Reich s'est toujours radicalement
opposée à la tendance atonale post-sérielle. C'est avec It's gonna rain
(1965) basée sur le simple « déphasage » d'une boucle de voix humaine
superposée à elle-même sur deux magnétophones tournant simultanément, qu'il
découvre la technique de « déphasage » (décalage entre phénomènes
périodiques superposés). Cette façon de travailler commandera sa musique
jusqu'en 1971.
Steve Reich demande à ses
interprètes une précision humaine et sensible et non la précision
indifférente d'un mécanisme, d'autant qu'il s'attache à la beauté du son
instrumental franc et lumineux. Son succès le mène vers l'utilisation
d'ensembles de plus en plus importants et différenciés dans leurs timbres et
vers l'emploi de structures musicales plus variées inattendues, contrastées,
colorées (jeux sur les timbres et sur les motifs).
America — Before the war
from Chicago
to New York
one of the
fastest trains
the crack
train from New York
from New York
to Los Angeles
different
trains every time
from Chicago
to New York
in 1939
1940
1941
1941 I guess
it must’ve been
Europe — During the war
1940
on my
birthday
The Germans
walked in
walked into
Holland
Germans
invaded Hungary
I was in
second grade
I had a
teacher
a very tall
man, his hair was
concretely
plastered smooth
He said, «
Black Crows invaded
our country
many years ago»
and he pointed
right at me
No more
school
You must go
away
and she said,
« Quick, go ! »
and he said,
« Don’t breathe!»
into those
cattle wagons
for 4 days
and 4 nights
and then we
went through these
strange sounding
names
Polish names
Lot of cattle
wagons there
They were
loaded with people
They shaved
us
They tattooed
a number on our arm
Flames going
up to the sky — it was smoking
After
the war
and the war
was over
Are you sure
?
The war is
over
going to
America
to Los
Angeles
to New York
from New York
to Los Angeles
one of the
fastest trains
but today,
they’re all gone
There was one
girl, who had a beautiful voice
and they
loved to listen to the singing, the Germans
and when she
stopped singing they said,
«More, more »
and they applauded
« Crack » in
the older sense of « best»
L’Amérique
— Avant la guerre
de Chicago à New York
l’un des trains les plus rapides
le super train de New York
de New York à Los Angeles
des trains différents à chaque fois
de Chicago à New York
en 1939
1940
1941
1941 je pense que cela devait être
Europe
— Pendant la guerre
1940
le jour de mon anniversaire
Les Allemands sont entrés
sont entrés en Hollande
Les Allemands ont envahi la Hongrie
j’étais à l’école primaire
j’avais un professeur
un homme très grand, ses cheveux étaient
gominés
Il a dit : « des Corbeaux Noirs ont envahi
notre pays, il y a de nombreuses années »
et il m’a montré du doigt
Plus d’école !
Il faut que tu partes
et elle a dit : « Va-t’en vite ! »
et il a dit : « Ne respire pas ! »
dans ces wagons à bestiaux
pendant 4 jours et quatre nuits
ensuite nous sommes passés par ces endroits
aux noms étranges
Des noms polonais
Là il y avait beaucoup de wagons à bestiaux
Ils étaient bourrés de monde
Ils nous ont rasés
Ils nous ont tatoué un matricule sur le
bras
Des flammes montaient vers le ciel — il y
avait de la fumée
Après
la guerre
et puis la guerre s’est terminée
Êtes-vous sûr ?
La guerre est finie
partant pour l’Amérique
vers Los Angeles
vers New York
de New York à
Los Angeles
l’un des trains les plus rapides
mais aujourd’hui ils ont tous disparu
Il y avait une fille qui avait une voix
superbe
et ils adoraient l’écouter chanter, les
Allemands
et quand elle s’arrêtait de chanter, ils
disaient :
« Encore, encore », et ils applaudissaient
« Crack » au sens ancien de « meilleur ».
DIFFERENT TRAINS - œuvre pour bande
magnétique et quatuor à cordes
« J'utilise dans Different trains,
une nouvelle manière de composer... L'idée générale est d'utiliser des
enregistrements de conversations comme matériau musical. L'idée de cette
composition vient de mon enfance.
Lorsque j'avais un an, mes parents se séparèrent.
Ma mère s'installa à Los Angeles et mon père resta à New York. Comme ils me
gardaient à tour de rôle, de 1939 à 1942, je faisais régulièrement la navette
entre New York et Los Angeles, accompagné de ma gouvernante. Bien qu'à l'époque
ces voyages fussent excitants et romantiques, je songe maintenant qu'étant
juif, si j'avais été en Europe pendant cette période, j'aurais sans doute pris
des trains bien différents. En pensant à cela, j'ai voulu écrire une œuvre qui
exprime avec précision cette situation. Voilà ce que j'ai fait pour préparer la
bande magnétique :
-
J'ai enregistré ma
gouvernante Virginia, maintenant âgée de plus de soixante-dix ans, qui évoque
nos voyages en train.
-
J'ai enregistré un
ancien employé des wagons-lits sur la ligne New York / Los Angeles, maintenant
à la retraite.
-
J'ai rassemblé des
enregistrements de survivants de l'holocauste : Rachella, Paul et Rachel,
tous à peu près de mon âge et vivant aujourd'hui en Amérique...
-
J'ai rassemblé des
sons enregistrés de trains américains et européens des années 1930, 1940.
Pour combiner les conversations sur bande
magnétique et les instruments à cordes, j'ai sélectionné des exemples brefs de
discours, aux différences de ton plus ou moins marquées et je les ai transcrits
aussi précisément que possible en notation musicale. Ensuite les instruments à
cordes imitent littéralement la mélodie du discours. Les exemples de
conversation et les bruits des trains ont été transférés sur bande
magnétique... Trois quatuors à cordes séparés ont aussi été ajoutés à la bande
magnétique préenregistrée et le quatuor final, joué par des musiciens, vient
s'ajouter lors du concert...
Cette composition a donc une réalité à la fois sur
le plan documentaire et sur le plan musical. »
Steve Reich, 1989.
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